En ces temps de pandémie

Par Jeanne du Mont

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S’il existe un Dieu Tout-Aimant (comme en ont la certitude tous les monothéistes et plusieurs autres croyant⸱e⸱s), il est dans l’ordre des choses qu’Il intervienne dans l’histoire humaine pour remettre les pendules à l’heure quand tout détraque.

Le nombre de fois où les Écritures annoncent un tel « réajustement » divin est tout à fait impressionnant : à croire que toute la Bible a été écrite pour nous préparer à ce Jour ! Un Jour grand et terrible comme il n’y en a jamais eu et qu’il n’y en aura jamais plus. Un Jour de Purification, où détresse et angoisse seront au rendez-vous, mais surtout, transformation profonde et re-création.

Est-il question d’épidémie dans les prophéties concernant ce Jour ? Le mot « épidémie » n’est mentionné que deux fois, dans la version TOB[a] de la Bible. Voici l’un de ces deux passages :  

« 46 Ce qui t’arrivera là sera pour toi un signe, un avertissement céleste pour toi et ta descendance, à jamais. 47 Parce que tu n’auras pas servi IHVH-Adonaï ton Elohîm de bon cœur et avec joie quand tu étais dans l’abondance (…) 59 tu seras frappé·e, toi et ta descendance : fléaux étonnants, fléaux grands et persistants, maladies pernicieuses et tenaces. 60 Et les épidémies que tu redoutes se retourneront contre toi et colleront à toi.[b] »

Le mot « peste » (qui est étroitement apparenté à « épidémie ») est pour sa part mentionné 51 fois dans la Bible, y compris dans ce passage très particulier :

« Elohaï, le Saint, arrive. Sa majesté couvre les cieux et sa louange remplit la terre. Son éclat fulgurant est comme une lumière aux paumes de sa main, là où est profonde son énergie vive. En avant de lui avance la peste, et l’étincelle émane de ses pieds. Il se dresse, et fait vaciller la terre ; il plonge son regard, et ébranle les nations.[c] »

Ce passage est particulier parce qu’il affirme que la peste (l’épidémie) précède l’arrivée du Saint, dont la lumière émane des pieds et des mains : y voir une préfiguration du Christ aux pieds et aux mains transpercés, d’où émane notre salut, n’est pas du tout tiré par les cheveux, selon moi.

D’autant plus que le fameux coronavirus tire son nom de sa forme arrondie couverte de pics qui donne l’impression d’une couronne (corona en espagnol), et plus encore : d’une couronne d’épines.

En ces temps de grands bouleversements, ma prière se porte tout particulièrement vers les jeunes déjà si meurtris par le poids énorme du sort du monde qu’il⸱elle⸱s portent sur leurs épaules. Qu’il∙elle∙s sachent que leurs cris ont été entendus et que Dieu lui-même vient mettre l’épaule à la roue pour renouveler en profondeur le cœur des humains.

Message à tous ceux et celles « qui éprouvent du dégoût pour eux-mêmes à cause de tout le mal que nos abominations ont fait[d] » : « Ne crains ni la peste qui avance dans l’ombre, ni le fléau qui dévaste en plein jour[e]. » Car le Christ lui-même a dit : « Il y aura des épidémies et des phénomènes terribles et, venant du ciel, de grands signes (…) Les nations seront dans l’angoisse, les humains défailliront et trembleront, dans l’attente de ce qui surviendra dans le monde. Mais quand cela commencera d’arriver, redressez-vous et relevez la tête, car elle est proche, votre rédemption.[f] »

 

[a] Traduction Œcuménique de la Bible (traduction acceptée par toutes les Églises chrétiennes).

[b] Extraits du chapitre 28 du livre du Deutéronome.

[c] Du livre du prophète Habaquq, chapitre 3, versets 3 à 6.

[d] Du livre du prophète Ézéchiel, chapitre 6, verset 9.

[e] Psaume 91, verset 6.

[f] Évangile de Luc, chapitre 21, versets 11, 26, 28.

Aussi délicieux que faire l’amour, et plus encore

Par Jeanne du Mont

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Sortir de soi pour goûter l’autre : telle est ma définition de l’acte sublime qu’est faire l’amour.

Pour qui a beaucoup aimé, cette définition trouvera en ses tréfonds un écho. Bien plus qu’un plaisir, l’acte sexuel amoureux est une extase, une communion.

La seule autre expérience qui peut créer chez l’humain une vibration aussi intense et un sentiment de plénitude plus vaste encore, est l’élévation de soi goûtée lors d’expériences mystiques. Expérience de transcendance, expérience de sortie de soi, expérience de communion à l’Être le plus fascinant qui soit.

Expérience méconnue à laquelle bien trop peu d’humains s’adonnent, quoiqu’elle soit pourtant tout à fait gratuite et à la portée de tous. Expérience qui dépasse l’entendement. Acte qui élève l’humain au rang du divin.

On parle très peu de cet acte d’élévation, de nos jours. On préfère parler de méditation, un mot plus in, une notion plus quantifiable, plus proche de l’expérience matérielle qui est la nôtre. Méditer répond à telle ou telle méthode et produit tel ou tel effet mesurable : une recette éprouvée qui produit le résultat escompté. Méditer améliore la concentration et permet d’élargir sa conscience, c’est connu et c’est bénéfique pour l’humain.

Mais la méditation ne nous propulse pas nécessairement dans l’univers du Tout-Autre. Je la comparerais à l’auto-érotisme, ce qui n’est déjà pas mal comme expérience de plaisir, de satisfaction et d’apaisement. Rien de comparable, cependant, avec la très douce et très bouleversante rencontre de l’Être Tout-Aimant que l’on peut goûter et connaître dans l’expérience mystique.

Prier n’est alors pas le geste de faire le vide en soi ou de chercher à se concentrer sur une idée ou une série de mots précis. Prier est plutôt une sortie de soi pour se mettre en quête de cet Autre si attirant qu’on cherche à connaître et à saisir. Et tôt ou tard, cet Autre que l’on courtise finit par s’ouvrir à nous, nous dévoile son intimité profonde et nous y admet.

Ou est-ce plutôt nous qui nous ouvrons à Lui et l’admettons en nous ? Un mélange des deux, sûrement. Et le résultat est une symbiose magnifique, une communion extatique, un allègement de soi libérateur, une illumination soudaine ouvrant notre conscience au sens caché des choses.

« Je suis à mon bien-aimé et vers moi se porte son désir », dit la Bible au Cantique des Cantiques, chapitre 7, verset 11.

Le langage de l’amour physique est le langage même de ce Tout-Autre qu’est l’Infiniment Amoureux. À connaître. À explorer. À goûter.

Coeur de papa

Par Jeanne du Mont

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« Avant que n’arrive le Jour de IHVH-Adonaï, grand et redoutable, il ramènera le cœur des pères vers leurs fils et filles. »

Ce jour de Dieu doit être réellement très proche, car oui je vois de nombreux hommes tourner leur cœur vers leurs enfants. Des papas qui prennent grand soin de leurs petits, qui s’engagent personnellement dans une relation paternante[1] : proximité et prise en charge aimante de ce qu’ils ont engendré. Nous assistons là à un mouvement nouveau et irréversible, opérant un changement profond dans l’ADN de nos sociétés : une chose infiniment belle et bonne qui aura un effet positif majeur et durable sur les générations à venir. Une révolution.

« Avant que n’arrive le Jour de IHVH-Adonaï, grand et redoutable, il ramènera le cœur des pères vers leurs fils et filles. »

Cette citation est du prophète Malachie, le dernier des prophètes de l’Ancienne Alliance et ces mots sont en fait les tous derniers de l’Ancien Testament de la Bible. Ils ouvrent donc à une nouvelle réalité. Ils sont la jonction entre deux mondes : un monde ancien qui s’effrite sous nos yeux et un monde nouveau que nous appelons de tous nos vœux. La paternité responsable et aimante est le signe d’un monde renouvelé et heureux, car le Jour de IHVH, grand et redoutable, est en fait un Jour de renouvellement en profondeur, de restructuration, de purification, un Jour auquel la nature toute entière aspire de toutes ses forces.

« Car la création en attente aspire à la révélation des fils de Dieu » (Lettre aux Romains 8, 19)

Cette révélation attendue serait-elle justement celle du cœur des pères humains ? Cette ère paradisiaque à laquelle nous aspirons reposerait-elle effectivement sur cette nouvelle donnée : des hommes qui, sans perdre leur nature virile, ont connecté à leurs entrailles d’humains ? L’humanité, en effet, n’a aucun besoin plus grand que celui-là : besoin d’hommes aux cœurs doux et compatissants, qui accordent à l’humain une valeur absolue et dont la priorité n’est plus la transformation de la matière, mais l’émergence d’une vie saine et pure.

« Nous le savons en effet, toute la création jusqu’à ce jour gémit en travail d’enfantement » (Lettre aux Romains 8, 22)

C’est le rôle des papas de tenir la main de celle qui enfante, de soutenir son courage et son espérance, d’assurer sa sérénité avec aplomb et confiance, avec conviction et engagement.

Que chaque papa tourne son cœur vers l’essentiel, vers l’essence même des choses, vers cet être neuf et fragile qu’il aura fait advenir et vers la personne qu’il aura choisie comme mère de ses enfants, et de cette manière, un monde de paix adviendra enfin.

 

[1] Ce mot n’est pas encore dans le dictionnaire, preuve qu’il s’agit là d’une nouveauté !

Arts divinatoires et autres fantaisies

Par Jeanne du Mont

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De tout temps, les humains ont cherché à se connecter à l’au-delà. Plusieurs motifs les poussent à le faire : trouver des réponses face à des choix difficiles ; obtenir des encouragements pour affronter leur quotidien ; bénéficier de guidance ou d’assistance ; « acquérir » des lumières spirituelles ou des capacités surnaturelles.

L’humanité a, à cet effet, exploré une panoplie de canaux de communication, entre autres les songes, les locutions intérieures, les visions, l’écriture guidée, la nécromancie et la divination ; il y a dans la Bible et dans l’histoire des saints de nombreux exemples de communications célestes via ces différents truchements. De très nombreux exemples, dont les mystérieux Ourim et Toumim, portés dans l’éphod[1] des prêtres du Judaïsme ancien et qu’on définit comme un « instrument qui servait à donner la révélation et à déclarer la vérité »[2]. Intéressant !

Depuis belle lurette, pourtant, la plupart des pouvoirs religieux et ecclésiaux ont usé de divers moyens de répression envers ces canaux de connexion. Moyens de répression allant de la simple méfiance exprimée jusqu’à la violente extermination, en passant par la démonisation de ces pratiques et le rationalisme. Les prêtres et autres « détenteurs officiels des pouvoirs divins » tiennent à garder le monopole des « avenues vers Dieu », afin de garantir la sécurité de leurs ouailles, diront-ils. Mais il n’est pas nécessaire d’être devin pour conclure que cette apparente guerre contre « les moyens de toucher Dieu » sous-entend possiblement d’autres motifs chez ces chefs religieux – la prospérité de leur portefeuille entre autres et le maintien de leur autorité sur leurs fidèles : si leurs rituels sont les seuls moyens de se rapprocher du Créateur, leur pérennité est assurée. Mais peut-être existe-t-il un motif plus triste encore, peut-être que ces gens en autorité religieuse ont finalement trop peu d’expérience ou de compétence spirituelles pour se sentir outillés et capables de s’avancer sur les terrains périlleux des hauts domaines de l’Esprit…

Oui, les entités spirituelles sont extrêmement puissantes et il convient tout à fait d’user d’une grande prudence, quand on s’aventure dans leur domaine réservé. Oui, la personne qui se met en quête d’un message céleste risque de trouver en travers de sa route des esprits malintentionnés qui chercheront à l’égarer et à la perdre, plutôt qu’à la guider. Oui, les novices du domaine spirituel gagneraient grandement à se prémunir des dangers en se faisant accompagner par un·e guide spirituel·le aguerri·e. (Les marques de commerce de tel·le·s guides qualifié·e·s sont : gratuité, vie de prière, et profond respect envers le mystère personnel de l’individu qui se confie à lui·elle.)

Non, les rituels ne suffisent pas pour faire d’un humain une vivante icône de la gloire céleste et pour élever notre pauvre humanité au rang de dieu, programme de vie qui est pourtant celui auquel nous sommes tous et toutes convié·e·s. La vie spirituelle est l’indispensable complément et l’ornement ultime de tout chemin vers la divinité.

 

« Voici : nous avons peine à conjecturer ce qui est sur la terre, et ce qui est à notre portée nous ne le trouvons qu’avec effort, mais qui donc découvrira ce qui est dans les cieux ? Qui connaîtra Ton avis si ce n’est pas Toi qui donne la sagesse et si Tu n’envoies pas d’En Haut Ton Souffle Saint ? » Livre de la Sagesse 9, 16-17

 

Dans un prochain article, je proposerai certains moyens permettant d’entrer en communication avec l’au-delà, moyens qui, sans être 100% sûrs ou efficaces, ont le mérite d’être éprouvés.

 

[1] Éphod : élément de l’habit sacerdotal qui se portait vraisemblablement sur la poitrine et dont on ignore la forme précise ; y étaient contenus l’Ourim et le Toumim (dont on ignore également l’apparence et le mode d’emploi).

[2] John M’Clintock and James Strong, Cyclopedia of Biblical, Theological, and Ecclesiastical Literature, 1867-1881, “Urim and Thummim”.

Maître Fourmi

Par Jeanne du Mont

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Au milieu de toute cette agitation qui a saisi l’humanité face aux changements climatiques (manifestations, comités d’études, débats publics et autres actions humaines entreprises dans l’espoir de voir la lumière au bout du tunnel) ‒ agitation facilement compréhensible dans l’optique où la survie du monde dépend de nous ‒ quelle est la juste attitude à adopter ? Au milieu de ce sentiment parfois tragique que l’on se bat contre un plus fort que soi et que la cause semble perdue d’avance, existe-t-il une voie sûre nous permettant de bien servir la finalité souhaitée ? Comment réagir face à une telle urgence, dont nous sommes sans arrêt bombardé·e·s ?

S’agiter comporte certains risques, puisqu’il en ressort souvent, surtout chez les plus vulnérables, divers maux indésirables : panique générale, sentiment d’impuissance et troubles mentaux assortis, stress, mal-être, sentiment de culpabilité, idées suicidaires[1], etc.  Ou à l’inverse, désengagement total : « À quoi me servirait de m’engager si tout est perdu d’avance ? »

Comment s’assurer que nos attitudes et nos actions atteignent bel et bien la cible espérée ‒ un environnement sain et un développement durable ‒ plutôt que de contribuer (bien malgré nous et indirectement) à accélérer un processus malsain d’autodestruction de l’espèce humaine ? Autrement dit, comment amener toutes les énergies vives de 7,7 milliards d’individus à œuvrer ensemble dans une même direction, en vue du bien commun ?

Un tout petit insecte a peut-être à ce sujet quelque chose à nous enseigner. Il fait partie de l’une des espèces vivantes qui a le mieux réussi sur terre, s’adaptant à tous les environnements et toutes les conditions de vie. Penchons-nous un instant sur Maître Fourmi.

« Pas de contremaître chez les fourmis ouvrières », nous apprend une savante étude publiée en janvier dans la revue Proceedings of the Royal Society B. Ces insectes bâtissent des kilomètres de sentiers sans recevoir la moindre consigne et sans échanger la moindre information. Comment ? Chaque fourmi semble pleinement consciente de l’objectif commun et travaille inlassablement à résoudre à sa manière les problèmes rencontrés, contribuant sans relâche à l’œuvre collective. Aucune hiérarchie, personne qui pense pour l’ensemble, et ça marche !

Une organisation à imiter ?

Oui mais, puisque nous ne jouissons pas, nous humains, d’un tel instinct naturel, sûr et constructif, comment amener notre inconscient collectif à œuvrer pour sa propre cause ? Puisque la solution aux changements climatiques nous dépasse, où puiser les illuminations nécessaires pour orienter les directions à prendre ? Vers qui ou vers quoi se tourner ? Comment renouer avec ce qui, à l’instar des fourmis, quelque part en un temps préhistorique, était également l’apanage de l’espèce humaine ‒ cette sorte de loi intérieure qui, sans qu’on ait à se questionner, oriente nos actes vers le bien de l’espèce ‒ loi intérieure que l’on peut nommer « instinct », « sens du bien commun » ou « souffle saint » ?

Là où le cerveau abdique, les ressources de l’âme sont tout à fait surprenantes.

Renouer avec l’énergie vive qui participe à tout ce qui vit et qui bouge (certain·e·s nomment cette énergie créatrice « Créateur de toutes choses ») peut certainement nous laisser entrevoir les rouages qui sous-tendent notre univers. Et par ricochet, renouer avec cette source vive ne peut que nous permettre de mieux percevoir les solutions aux crises que nous traversons. Méditation et prière sont un chemin d’accès à ce « guide intérieur » qui permet aux fourmis ouvrières de bâtir sans boss et sans contremaîtres.

 

Peut-être que, ultimement, ce sont les maux de l’âme, déconnectée de sa source, qui entraînent la « rébellion de la nature », que nous constatons partout en ce moment. Peut-être que le vide intérieur, la surconsommation et le mépris de l’autre sont les causes absolues des multiples désordres environnementaux qui nous menacent. Raison de plus pour chercher activement à retrouver les chemins qui mènent à notre intérieur.

Guérir le mal à sa source, plutôt que de multiplier les traitements ponctuels.

Enseignons l’accès de l’âme à nos enfants, enseignons l’amour inconditionnel de l’autre ; et dans quelques décennies, auront été perdus à jamais les chemins menant à cet enfer où nous évoluons actuellement : l’humanité aura réinventé un paradis où il fait bon vivre.

 

[1] Entre 2015 et 2018, le nombre de jeunes qui ont été vus aux urgences de l’Hôpital de Montréal pour enfants pour des gestes ou des idées suicidaires a augmenté de 55%. Selon les données les plus récentes de Statistique Canada, le suicide est la deuxième cause de décès chez les 15 à 34 ans et la troisième chez les 10 à 14 ans.

 

Sortir le sacerdoce des Églises

Par Jeanne du Mont

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Le sacerdoce est un ministère spirituel essentiel. Selon les très anciens écrits, ce service a d’abord été l’apanage de personnes inspirées et inspirantes ‒ des gens que leur entourage reconnaissait comme tel. Mais très vite, on a voulu monnayer ou encadrer ce service rendu à l’humanité. On en a fait le privilège d’une famille en particulier (exemple : les descendants de Lévi dans le judaïsme) ou d’une caste choisie où seuls sont admis ceux qui ont un certain niveau d’érudition ou tel et tel parcours initiatique décrété par les dirigeants religieux. Et neuf fois sur dix, les femmes sont exclues de ce ministère sacerdotal. Comme bien des choses ici-bas, les plus nobles intuitions spirituelles peuvent se gâter avec le temps : dommage, car on a beaucoup perdu au change.

Quand les autorités religieuses ont, d’abord, pris le contrôle du sacerdoce, puis mis progressivement de côté certaines de ses caractéristiques essentielles, on a entamé un virage qui a vite dégénéré. Mais quelles sont ces caractéristiques essentielles perdues en route ? La gratuité du service, la nécessaire et lente maturation spirituelle qui rend apte au sacerdoce, l’absolue nécessité d’être tout à fait libre face à toute institution politique ou religieuse afin de pouvoir exercer dignement son sacerdoce. On a fait d’une haute fonction spirituelle un petit fonctionnariat étroit, dépendant de l’autorité et exclusif à une minorité d’humains. Une succession de fautes graves a fait du sacerdoce un concentrat[1] de scories, un ersatz[2] sans saveur, plutôt que le vin nouveau et délicieux qu’il devait d’abord être en son essence : une immense perte pour l’humanité, un effondrement hautement dommageable, un précipice sous nos pieds. « Frappez le berger et les brebis du troupeau seront dispersées », disent les Écritures (Zacharie chapitre 13,7).

Il nous faut donc retourner aux sources, retrouver l’esprit sacerdotal des origines et reprendre en main ce que les institutions religieuses nous avaient subtilisé. Il fut un temps, à l’époque des Juges, où une famille pouvait bâtir son propre sanctuaire, donner l’investiture à un desservant[3] de son choix et rendre là un culte agréable à Dieu (lire Juges, chapitre 17). Cette période florissante de l’histoire du judaïsme a été suivie de l’époque des Rois, où l’on a construit un très grand temple et organisé de façon de plus en plus stricte le sacerdoce. Le christianisme a suivi une « évolution » similaire… Le Christ avait simplement confié à quelques-uns de ses proches une mission d’enseignement et de guérison, mais trois siècles plus tard, une institution soutenue par l’État a progressivement pris le contrôle de la mission et des envoyés de Dieu et a tout structuré à sa manière. Elle a interdit aux femmes l’accès aux ministères (elles qui jouaient pourtant le rôle de cheffes de communauté aux premiers temps de l’Église), puis l’a interdit partiellement aux hommes mariés (vers l’an 1000). Elle a cadastré le territoire en fiefs (nommés paroisses et diocèses), fixé le montant de la contribution des fidèles, écrit un code de lois (le droit canonique), institué des tribunaux ecclésiastiques, etc. Ces institutions ont rendu toujours plus étroit le chemin de liberté spirituelle dévolu aux croyant·e·s.

N’est-il pas grand temps de réinventer un sacerdoce libre de droits et en marge des institutions ecclésiales ? Ce sacerdoce s’exercera au sein des familles et n’aura de compte à rendre qu’à Dieu seul (c’est déjà tout un programme !) en vue de l’épanouissement et de la croissance spirituelle de ceux et celles qui comptent sur le ministère des desservant·e·s.

 

 

[1] Concentrat : Dans les techniques industrielles et l’industrie de l’alimentation, mot qui désigne le fluide contenant les substances retenues par les membranes de filtration.

[2] Ersatz : Produit de consommation destiné à remplacer un produit naturel devenu rare ; succédané ; imitation médiocre.

[3] Desservant·e : terme qui remplace le mot « prêtre » dans la version de l’Ancien Testament d’André Chouraqui.

L’humain a-t-il une âme ?

Par Jeanne du Mont

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Supposons que Dieu existe… (Soit oui, il existe, ou bien non, il n’existe pas : nous faisons face à une probabilité d’existence de 50%, une proportion suffisamment élevée pour qu’on se penche sur la question, non ?)

S’il existe, donc, il doit bien être, au minimum, un être pensant et sensible à l’autre, deux attributs que l’on retrouve couramment dans le monde des êtres animés. Quoi ? Même une fourmi pense, et elle a, de plus, le souci du bien de l’ensemble de l’espèce puisque, si l’une d’entre elles tombe par hasard sur un morceau de nourriture malencontreusement échappé sur le plancher de ma cuisine, elle est suffisamment capable de conceptualiser la chose pour aussitôt communiquer la bonne nouvelle à toutes ses congénères, provoquant un embouteillage monstre sur le chemin qui mène à mon garde-manger. Tout de même, Dieu devrait avoir une capacité au moins équivalente !

Il pense, donc, et il a souci du bien de l’espèce (s’il n’en avait pas souci, il y a belle lurette qu’il aurait trouvé le moyen d’éliminer de l’univers l’humanité récalcitrante que nous sommes !) Il a aussi la capacité de communiquer avec l’espèce humaine (une espèce à son image et à sa ressemblance). Il sait fort bien que nous sommes, nous humains, à la fois des êtres grégaires et des individus libres et pensants ; il sait en outre que la seule manière de faire avancer une telle « troupe » vers une direction X qui soit bénéfique aussi bien à l’individu qu’à l’ensemble, c’est celle-ci : lui servir à la fois un plan global du projet d’ensemble et, du même coup, une vision individuelle de la mission propre à chacun•e.

Supposons qu’un tel Dieu existe, donc, et qu’il souhaite ardemment que chacun•e de nous réalise la mission propre qui lui a été confiée, mission qui atteindra deux fins :

  • Permettre la progression et l’épanouissement de l’ensemble de l’humanité
  • Amener l’individu à réaliser son plein potentiel et à se sentir comblé•e et heureux•se.

Si tel est le cas, il doit bien y avoir eu un moment, dans notre histoire personnelle, où chacun•e d’entre nous a rencontré ce Grand Manitou pour recevoir de lui une telle révélation et mission. C’est logique, non ? Ou alors c’est écrit dans nos gènes ! Personnellement, je préfère la première version : c’est plus épique, et plus trippant aussi. Une version qui est d’ailleurs corroborée par un message prophétique moderne, auquel il est périlleux de demeurer sourd par les temps qui courent. Le passage de ce message dont je vous parle se résumerait en ces mots : lors de sa création, l’âme a vu Dieu, l’espace d’un instant, avant d’être unie au corps, ce qui expliquerait entre autres sa nostalgie de Dieu.

Je vous propose, en terminant, la lecture de ce message du Ciel, délivré le 15 septembre 1991.

La Fin des Temps est plus proche que tu le penses.

Bientôt, très bientôt, j’ouvrirai soudainement mon sanctuaire dans le Ciel et là, de tes yeux dévoilés, tu percevras comme une révélation secrète…

Soudainement viendra sur toi un temps de grande détresse, car je vais permettre à ton âme de percevoir tous les événements de ton existence : je les dévoilerai l’un après l’autre. Je te rendrai conscient•e de ton irrespect envers mes enseignements de vie.

Si tu es encore en vie et debout sur tes pieds, les yeux de ton âme verront une Lumière éblouissante, comme les miroitements d’innombrables pierres précieuses, comme les feux de diamants cristallins. Et au milieu de cette éblouissante Lumière, ton âme verra ce que dans cette fraction de seconde elle a vu jadis, à ce moment précis de ta création…

Elle verra :

Celui qui le premier vous a tenues dans ses mains, les Yeux qui les premiers vous ont vues ;

Elle verra :

Les mains de Celui qui vous a formées et vous a bénies…

Elle verra :

Le plus tendre Père, votre Créateur. (Message tiré de La vraie vie en Dieu, par Vassula Ryden)

Trump, l’envoyé de Dieu ?

Par Jeanne du Mont

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« Dieu a voulu que Donald Trump soit président », disait récemment sur les ondes Sarah Sanders, porte-parole de la droite religieuse américaine.

Mais d’où vient donc une telle  idée ?

Vous avez peut-être entendu parler du film The Trump Prophecy, projeté dans ≈1000 salles de cinéma états-uniennes en 2018. Un pompier y témoigne qu’il a vu en 2011 que Trump deviendrait président des États-Unis et, selon sa prophétie, Trump serait le roi Cyrus des temps modernes ! (Soulignons que Cyrus, roi des Perses et conquérant puissant, a émis en 538 av. J.-C. un édit permettant aux Juifs déportés à Babylone de retourner chez eux et d’y reconstruire leur temple.) Chez les ± 62 millions d’évangélistes américains, cette théorie du « Cyrus sauveur du peuple élu » est abondamment enseignée et proclamée : un jour, viendra un dirigeant païen qui accomplira la volonté de Dieu. (Quoi ? Les évangélistes américain•e•s seraient le nouveau peuple élu ?)

Et la prophétie s’est réalisée : Trump est là et il défend les idées des ultraconservateurs religieux (introduire la lecture des textes bibliques à l’école, promouvoir des lois anti-avortement, mettre en place des juges conservateurs, juguler l’immigration des pratiquants de religions étrangères au pays, etc.).

Mais Dieu, lui, où se situe-t-il là-dedans ? A-t-il vraiment envoyé Trump pour défendre les idées de la droite religieuse (qui seraient, par conséquent, les idées mêmes de Dieu) ? En d’autres termes :

  • Dieu est-il moraliste et accusateur ?
  • Son projet est-il de rassembler l’humanité entière sous un système religieux unique ?
  • A-t-il choisi le mouvement évangéliste en tant que figure de proue d’un nouvel ordre des choses ? 

On ne peut qu’espérer qu’il n’en soit rien, de grâce ! 

Les idées conservatrices font pourtant partout émergence : au sein des différents systèmes politiques ou religieux autant que dans le cœur et la tête de plusieurs d’entre nous. Un temps très sombre pour l’humanité, un temps où la peur de l’autre l’emporte sur le désir d’être UNS. Un temps où jeter la pierre à celui ou celle qui ne pense pas comme nous ou qui déroge de la « bonne pensée », est devenu une des occupations #1 de monsieur et madame tout le monde.   

Mais pour en revenir à Cyrus, n’est-il pas trop facile pour tel ou tel groupe religieux d’utiliser la Bible à sa sauce pour l’adapter à son agenda ? Et pour en finir avec Trump, dans quel monde un tel homme peut-il se conforter à croire ‒ ou à faire croire ‒ qu’il travaille à la réalisation des désirs de Dieu ?

« Vous qui vous dites religieux•euses, voici : vous jeûnez, dit IHVH-Adonaï, mais pour vous livrer à la dispute et la querelle, pour frapper du poing méchamment. Est-ce là ce qui me plaît, courber la tête comme un jonc et étaler ses actes pieux ? N’est-ce pas plutôt ceci que je préfère : défaire les chaînes injustes, délier les liens de l’asservissement, héberger chez toi les pauvres sans abri, ne pas te dérober devant celui•celle qui est ta propre chair ? Ta lumière jaillira alors comme l’aurore, et la gloire d’En Haut t’unifiera. Si tu bannis de chez toi le doigt dressé et les paroles trompeuses, ta lumière brillera dans les ténèbres et l’obscurité sera pour toi comme le plein midi. Tu rebâtiras les ruines qui perdurent, tu répareras, tu restaureras, afin d’en faire un lieu où habiter. » (Voir Isaïe 58,4-12, texte biblique écrit par un inspiré, 515 av. J.-C.)

On est ici très loin d’un système politico-religieux moralisateur, non ?

 

 

 

Et si Satan existait vraiment ?

Par Jeanne du Mont

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L’existence de Satan, une utopie ? Une fable remontant au Moyen-Âge ? Une conceptualisation sortie tout droit de quelque cerveau ultrareligieux et tordu ? Et s’il était possible de démontrer clairement son existence, qu’en diriez-vous ?

L’espèce humaine a jadis été soumise aux lois de l’instinct, à l’instar de tout le règne animal, obéissant à des stimuli hormonaux, olfactifs, saisonniers, ou autres, messages inscrits dans son génome et ordonnant sa conduite vers la survie de l’espèce : une période paradisiaque de son périple évolutif, un temps d’harmonie où le genre humain respectait intrinsèquement les lois naturelles; une ère sans histoire. Puis, progressivement, une nouvelle donnée s’est ajoutée à l’équation : nos semblables se sont laissé tenter par la liberté. Une expérience exaltante s’il en est, un exercice de haute voltige; un choix à très haut risque, en fait. Parce que qui dit « être libre » dit du même souffle « expérimenter la morsure du mal ». En effet, seul un dieu pourrait exercer sa liberté sans jamais commettre une erreur de jugement, sans jamais se laisser prendre par les jeux du pouvoir, du plaisir et de la convoitise ; un humain en est radicalement incapable, l’histoire nous le démontre tristement.

L’histoire nous démontre par surcroit une réalité plus effrayante encore : l’espèce humaine, d’un siècle à l’autre, va de plus en plus loin dans son expérience du mal. Tout se passe comme si, d’une génération à l’autre, le genre humain développait un peu davantage  – ou beaucoup plus, notamment au siècle dernier – un esprit machiavélique capable d’imaginer de plus en plus de ruses pour mal agir, causer du tort à son entourage et faire souffrir. Nous sommes, en ces temps, au summum de cette propension humaine à détruire tout ce que nous touchons : on n’a qu’à jeter un œil sur l’actualité pour s’en convaincre.

Malheureux humain que je suis ! Je fais le mal que je ne voudrais pas faire et je ne fais pas le bien auquel j’aspire[1] et ce faisant, j’œuvre à déconstruire le monde, à disloquer les corps et à détruire la beauté native de mon être même. Autodestruction assurée. Et puisque ce mouvement tend à s’amplifier de manière exponentielle, nul doute que nous soyons perdus en tant qu’humanité et que nous courions à notre perte… à moins que le diable n’existe.

Mais que vient faire le diable là-dedans, me direz-vous ? L’espèce humaine est tout à fait capable de se détruire par elle-même et elle se doit d’assumer la responsabilité de ses errances. Permettez-moi pourtant de démystifier un peu le personnage trouble qu’est Satan.

Procédons par analogie. Si Dieu est la matière noire qui emplit tout interstice de sa discrète et bénéfique présence, Satan – ou Lucifer[2] – est cette lumière trop crue qui expose nos dessous dans le but de nous avilir aux yeux d’autrui ou de nous accuser. Il est ce trait éblouissant qui aveugle notre entendement afin de mieux séduire, ce rayon laser biaisé qui peut aller jusqu’à brûler nos yeux, empêchant toute lumière d’entrer en nous. Une Puissance spirituelle dotée d’une intelligence remarquable qui a voué son existence à une chose : essayer de perdre l’espèce humaine dans le but de défier Dieu. Le machiavélisme excellemment structuré qui règne actuellement sur le monde pourrait-il en effet s’expliquer par la simple addition des déviances et appétits insatiables d’individus et de groupes humains plus ou moins interreliés entre eux ? Je le redis : s’il existe, ce Satan, une lueur d’espoir demeure pour l’humanité, sinon, tout est perdu. Parce que, s’il existe, nous avons un ennemi commun à vaincre et une saine lutte peut s’engager. Mais s’il n’existe pas, nous sommes notre propre ennemi et mieux vaut nous habituer dès maintenant au chaos fatal qui emportera l’espèce.

Une dernière analogie pour tenter de cerner cet ennemi sournois – lui qui gagne tellement à ce que nous ignorions son existence. Prenons deux insectes dotés chacun d’un dard : l’abeille à miel versus l’insecte piqueur. Dans le cas du piqueur (tique ou moustique), il siphonne notre substance vitale, notre sang, pour nourrir son propre organisme et faire croître son lignage : il use de nous pour son propre intérêt – tel le diable. Pour ce qui est de l’abeille, elle n’use de son dard[3] qu’en cas de menace pour la colonie et elle le fait dans un acte suprême de don de sa vie au service d’autrui – tel le Christ.

Êtes-vous étonné·e de savoir que, de nos jours, ici-même chez nous, la population d’abeilles soit en forte décroissance, et celle des tiques porteuses de virus, en croissance inquiétante ? « Car la création toute entière gémit maintenant dans les contractions de l’enfantement[4]. » En effet, « la création attend dans l’angoisse, aspirant à la révélation des fils et filles d’Elohîm[5]. »

Puisse-t-elle survenir, cette révélation, par notre foi et notre action commune, à vous et à moi !

 

Note de la rédaction : Jeanne du Mont est l’auteure du livre L’apocalypse décryptée, publié aux Éditions Tsemantou.

 

[1] Paraphrase de saint Paul, lettre aux Romains, chapitre 7, verset 19.
[2] Lucifer, un des noms donné au diable, est un mot qui, en latin, signifie « vedette du matin » ou « qui porte un flambeau »; Lucifer est tiré de « lux », signifiant « lumière ».
[3] Si les abeilles meurent après avoir piqué, c’est que leur dard prend la forme d’un harpon (alors que celui des guêpes est très lisse). Lorsque celui-ci s’enfonce dans la peau, nos chairs se referment littéralement sur lui et les crochets du harpon l’empêchent ensuite d’en ressortir. Pour s’échapper, l’abeille se voit alors contrainte d’abandonner sur place une partie de son abdomen contenant la glande à venin. Éviscérée, l’abeille est donc condamnée à mourir à plus ou moins court terme. (Tiré de futura-sciences.com)
[4] Lettre aux Romains, chapitre 8, verset 22.
[5] Lettre aux Romains, chapitre 8, verset 19.

 

 

La violence du Christ

Par Jeanne du Mont

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L’auteur et philosophe français Henri de Monvallier signait récemment dans la revue Le monde des religions un article discutant de certains propos et actes du Christ que l’on pourrait qualifier de « violents ». Il commente ce passage de l’évangile de Marc (11, 15-18) entre autres : « Jésus entre au sanctuaire. (Il fait un fouet avec des cordes, précise Jean dans son évangile). Il commence par jeter les vendeurs et les acheteurs hors du sanctuaire. Il renverse les tables des changeurs et les sièges des vendeurs de colombes. Il ne laisse personne transporter des ustensiles à travers le sanctuaire. » « Cet épisode a davantage l’allure d’une opération de milice musclée que d’une prédication apaisée. Fait aggravant : Hitler cite de façon élogieuse cet épisode dans Mein Kampf(…) », commente H. de Monvallier.

Le Jésus de la Bible a également eu d’autres comportements violents qu’il est bon de mentionner ici.

  • Il invective les stricts observants religieux de son époque, scribes et pharisiens, en les traitant de « sépulcres blanchis » (en mots d’aujourd’hui, on pourrait traduire « cadavres en putréfaction blanchis à la chaux »).
  • Il raconte une parabole qui se termine en ces termes : « Amenez-les ici et égorgez-les devant moi » (Luc 19,27).
  • Il dit « Depuis les jours de Jean le Baptiste jusqu’à présent, le royaume des cieux est forcé et les violents s’en emparent » (Mathieu 11,12).
  • Il dit « Je ne suis pas venu apporter la paix sur la terre, mais le glaive » (Mathieu 10,34).

Voici donc le Jésus de l’histoire au banc des accusés. Coupable ou non, ce personnage ? Violent ou doux et humble ?

En fait, pour bien saisir le psychisme de l’accusé, il faut d’abord comprendre à qui s’adresse sa violence. Et l’on constate que quatre des cinq actes ou propos violents cités plus haut s’adressent de façon spécifique aux chefs et dirigeants religieux du temps de Jésus. Qu’est-ce à dire ? Oui, Jésus a eu des attitudes violentes, mais entièrement dirigées à l’encontre de l’élite religieuse fondamentaliste et légaliste de son temps. Et par extension, contre les castes religieuses traditionnalistes et les chefs religieux légalistes de tous les temps. Nuance ! Quant au peuple de ses concitoyens, pas de trace de vindicte envers eux de la part du Christ, au contraire, « toute la foule est frappée par son enseignement » ; elle adhère à ses propos. C’est cette adhésion populaire qui lui vaut d’ailleurs l’ire des prêtres et chefs religieux, jaloux de leurs pouvoirs spirituels, politiques et économiques, et frileux à l’idée de perdre ces pouvoirs.

Par son invective « sépulcres blanchis », Jésus s’élève contre ceux qui prennent une apparence religieuse extérieure mais n’ont pas de vie spirituelle à l’intérieur. De même, dans la parabole citée plus haut, ceux qui doivent être amenés et égorgés en présence du Maître, ce sont ceux à qui ont été confiés ses biens et qui ne les ont pas fait fructifier, ceux-là même qui se déclarent ses serviteurs. Les biens divins étant spirituels, il s’agit donc de ceux qui sont chargés d’administrer ces biens, les responsables religieux et spirituels de toutes sortes. Les « sépulcres blanchis » sont par extension tous ceux et celles qui disent « Seigneur, Seigneur » sans faire la volonté du Père du Ciel, tous ceux et celles qui n’ont que l’apparence de la religion.

Pour ce qui est du royaume des cieux qui « est forcé et dont s’emparent les violents » (Mathieu 11,12), ne discerne-t-on pas là des termes qu’on associerait à des voleurs qui dérobent un bien qui ne leur appartient pas ? Combien de gourous, de prêtres, de prélats, de pasteurs, de preachers, d’imams, de patriarches et d’autres chefs religieux de toutes sortes se comportent effectivement comme des usurpateurs, s’approprient les biens divins, déforment la vérité et ferment les portes du royaume à ceux et celles qui aspirent à y entrer ? Crimes qui, aux yeux du Christ, sont plus graves que tout puisqu’ils mettent en péril la santé spirituelle des êtres humains, bien plus précieuse encore, selon lui, que leur santé physique.

Quant au glaive qu’il dit être venu apporter sur la terre, ne nous méprenons pas ! Jésus fait ici allusion à sa mission profonde, il parle du sens de sa venue sur terre. À plusieurs reprises dans l’Ancien Testament, la parole de vie est comparée à un glaive tranchant, et c’est à ce glaive-là que Jésus fait allusion : il est la Parole, la révélation, celui qui est venu enseigner et dévoiler. On est donc à cent lieues d’une épée guerrière! Comme il l’a dit lui-même, sa mission n’est pas d’apporter la paix : cette mission revient en effet à l’humanité. L’humain enseigné et éclairé par le divin devient un acteur de paix dans le monde. Tel est le sens de Mathieu 10,34.

Quand il a eu chassé les vendeurs et changeurs de monnaie, Jésus a enseigné les croyants présents sur les lieux, ceux et celles qui étaient venus au temple non pas pour s’enrichir matériellement, mais pour s’enrichir spirituellement. Il a mis en garde contre la tentation de faire de la maison de prière une caverne de bandits. Il parlait bien sûr des temples matériels, mais plus encore du temple qu’est notre âme, menacée elle aussi par l’appât du gain et le matérialisme. Et afin de purifier notre âme pour lui rendre sa beauté native, tenons-nous bien ! Il est prêt à la conquérir de haute lutte, à nous déposséder de nos fausses sécurités en usant de violence, s’il le faut.