Pour en finir avec l’appropriation culturelle

Par Johane Filiatrault

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Plusieurs groupes ethniques, ces temps-ci, reprochent aux uns ou aux autres une faute que l’on nomme « appropriation culturelle ». J’aimerais ici qu’on m’explique en quoi le fait d’éprouver suffisamment de respect et d’admiration pour tel ou tel élément culturel qui n’est pas nécessairement le nôtre « de naissance » peut constituer un délit d’une telle gravité. En quoi le fait de vouloir faire la promotion d’un ou l’autre aspect d’une ou l’autre culture que l’on considère géniale nuit-il à l’ensemble ou au particulier ?

Car, à ce que je sache, nous appartenons tous à la même espèce humaine ! Et, selon les lois naturelles, tout échange culturel, tout ce qui peut permettre à l’ensemble d’évoluer vers un mieux-être, vers une pensée plus large et un meilleur agir humain, devrait être encouragé, favorisé et félicité, non ?

Moi, personnellement, en tant qu’individu, j’éprouve une grande fierté à ce que quelqu’un d’autre reprenne l’une ou l’autre de mes idées et la propage. Si quelqu’un juge utile de relayer ma pensée ou un aspect de mon vécu, n’est-ce pas effectivement la preuve de la pertinence de ce je que suis et de ce que je dis ou écris ? Tant mieux si mes idées et mon expérience se propagent et font leur chemin le plus loin possible ! Si mon souci est de faire progresser la réflexion de mes semblables en vue d’un mieux-être, d’une pensée plus large et d’un meilleur agir humain, bingo ! Le but est atteint. Mais si mon but était de me faire voir et de faire dire partout dans les médias : « Johane Filiatrault a émis telle idée ou a vécu telle expérience », là, oui, je pourrais crier à l’appropriation de ma pensée !

Humains de cette terre, quels sont nos motifs, je vous le demande ? Faire la promotion de ce que nous sommes individuellement ou poursuivre ensemble un haut et noble but ?

Vous vous rappelez cette histoire de la tour de Babel ? L’humanité n’avait qu’un seul et même langage (une seule et même culture) jusqu’au jour où l’orgueil prit le dessus, poussant les humains à vouloir manifester de façon ostentatoire leur grandeur et leur savoir. Conséquence de ce dérapage : langues et cultures se multiplièrent, divisant les humains en groupuscules, souvent en opposition les uns aux autres. Devons-nous conclure de cette histoire que, si nous souhaitons faire machine arrière, défaire les constructions de l’orgueil et faire advenir une ère de paix et de réconciliation humaine, nous devrons d’abord cultiver en nous-mêmes une vertu trop souvent oubliée, ayant pour nom « humilité » ?

« Ne faites rien par rivalité, rien par égoïsme ou pour votre gloire personnelle, mais, avec humilité, estimez que les autres vous surpassent » : c’est là la plus belle définition de l’humilité qu’il m’ait été donné de voir.

Estimer que tel ou tel aspect de la culture d’un autre individu ou groupe de personnes égale ou surpasse ma propre culture − et par le fait même, vouloir en faire la promotion : y a-t-il vraiment là une faute ?